Pour éradiquer l’épidémie du VIH, il est urgent de mettre fin aux inégalités de genre


À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, l’Association de lutte contre le sida (ALCS) rappelle que près d’une personne sur deux vivant avec le VIH est une femme. Cette féminisation de l’épidémie exige une riposte sensible aux inégalités de genre.

Le constat dressé en cette Journée internationale des droits des femmes est particulièrement inquiétant. Au Maroc, 43% des personnes vivant avec le VIH sont des femmes. Une proportion en augmentation constante depuis le début des années 1990 où ce pourcentage était inférieur à 18%. Cette surreprésentation des femmes fait que le VIH/sida est devenu la première cause de mortalité des femmes âgées de 15 à 49 ans à l’échelle mondiale[1].

Les inégalités de genre et la violence à l’égard des femmes alimentent l’épidémie

Aujourd’hui, il est largement admis que les inégalités hommes - femmes et l’épidémie du VIH sont inextricablement liées. Or, en 2019 le Maroc se classait au 111ème rang sur 162 de l’indice d’inégalité de genre[2], indice composite développé par les Nations Unies, mesurant le déficit de progrès dans trois dimensions du développement humain. Ce classement peu élogieux pointe du doigt les normes de genre inégales qui, en étouffant la voix des femmes et des filles marocaines et en entravant leur accès à l’éducation et aux ressources économiques, les rendent plus vulnérables au risque d’infection par le VIH. Par ailleurs, la vulnérabilité anatomique et physiologique des femmes face au VIH les expose à deux fois plus de risque d’être infectées par le virus que les hommes. Celle-ci est amplifiée par leur vulnérabilité socio-économique qui les rend bien souvent dépendantes économiquement et psychologiquement de leurs partenaires, et constitue de ce fait un obstacle à l’adoption d’un moyen de prévention. C’est ainsi que 70% des femmes infectées par le VIH ont été contaminées par leur conjoint[3]

le lien entre les violences à l’égard des femmes et l’infection au VIH est solidement documenté. Au Maroc, selon l’enquête nationale sur la violence à l’encontre des femmes et des hommes réalisée en 2019 par le Haut-Commissariat au Plan[4], la prévalence de la violence à l’égard des femmes est de 57.1%. Par ailleurs, cette même étude montre que les formes de violence sexuelle ont enregistré des augmentations notables de l’ordre de 5 points entre 2009 et 2019, passant de 9% à 14%. À cet égard, les conséquences relevées par ONUSIDA sont particulièrement éloquentes : dans certaines régions du monde, les femmes qui ont subi des violences physiques ou sexuelles de la part d'un partenaire intime ont 1.5 fois plus de risques de contracter le VIH que les femmes qui n'ont pas subi de telles violences.

Pour une riposte adaptée aux inégalités de genre

En septembre 2021, des résultats préliminaires de l’évaluation genre de la riposte nationale au VIH 2019/2020 menée par le ministère de la Santé et de la Protection sociale avec le soutien d’ONUSIDA ont été publiés. Cette évaluation recommande la mise en œuvre d’une stratégie transformatrice sur le genre et la mise en œuvre de réformes législatives et réglementaires destinées à mettre fin aux discriminations dont sont victimes les femmes notamment.

Alors que l’ALCS se mobilise en cette Journée internationale des droits des femmes dans toute leur diversité et leurs capacités, elle appelle le ministère de la Santé ainsi que l’ensemble des acteurs institutionnels concernés à:

-  Publier en urgence l’intégralité du rapport de l'évaluation genre de la riposte nationale au VIH 2019-2020;

-  Mettre en oeuvre sans plus attendre la stratégie transformatrice sur le genre recommandée;

-  Former les prestataires de services de santé en matière de genre, de droits humains et de non-discrimination;

-  Concevoir en concertation avec la société civile et les représentantes communautaires  un plan d’action précis et budgétisé;

-  Généraliser en concertation avec les ministères concernés un programme d’éducation sexuelle sensible au genre.

À propos de l’ALCS

Créée en 1988 par Pr. Hakima Himmich et reconnue d’utilité publique en 1993, militante et communautaire, l’ALCS est impliquée à la fois dans la prévention de l’infection à VIH, l’accès aux soins et la prise en charge médicale et psychosociale des personnes vivant avec le VIH. Membre fondateur de Coalition PLUS, union internationale d'organisations communautaires de lutte contre le VIH/sida et les hépatites créée en 2008, l’ALCS est présidée par le Pr Mehdi Karkouri.

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16-03-2022 / 20-03-2022

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